L’éducation aux médias

Catégorie : Les petits trucs Page 8 of 12

Ma réforme à moi …

Je lis les blogs depuis ces derniers jours, je jette un oeil sur les journaux et j’ai le gout d’intervenir sur un sujet qui me brûle les lèvres. 

Le discours que l’on tient depuis quelques temps partout me révolte et je sais que je ne suis pas le seul.  Certains amis enseignants pensent la même chose que moi et c’est leur réaction qui m’a incité à écrire ce billet.

Retournez un peu en arrière avec moi.  Juste le temps d’aligner les perspectives, disons. Je suis de la génération de l’audio-visuel et de la méthode du Sablier.  Ces deux pratiques étaient évidemment décriées tant et si bien qu’elles ont été abandonnées.  Les résultats étaient terribles! Pauvres enfants, nous n’avions aucune notion orthographique.  Nous ne faisions qu’écrire aux sons.  Mais qu’allait-il advenir de nous, bon sens?  C’était affreux!  Nos parents étaient outrés, eux qui avaient tout appris par coeur.  Ils se rendaient bien compte que leurs enfants ne pouvaient pas réciter la moitié de ce qu’eux savaient. À cette époque, l’école enseignait aux enfants à regarder des diapositives, à écouter la télé et à écrire aux sons.  Désastre.

Aujourd’hui, les parents ont changés mais les insatisfactions demeurent.  Il semble qu’au Québec, le système d’éducation soit bel et bien "né pour un petit pain".  Aurait-il du succès et serait-il repris dans d’autres pays qu’on en aurait encore plus honte.  Que voulez-vous?  Les choses sont ainsi.  Vous me permettrez ici de prendre un ton acerbe (Pour quelqu’un qui ne faisait que regarder la télé à l’école, j’ai tout de même retenu quelques mots.  Et constatez tous les costumes des sons que je peux utiliser depuis le début de ce billet.  Mes profs du primaire seraient fiers de moi.  En passant, je les salue chaudement.  Je crois qu’ils ont fait du bon travail.).  Donc, oui, un ton acerbe, disais-je.  Quand je pense que ces gens qui se plaignent en ce moment que les enfants ne savent plus écrire sont ces mêmes gens qui écrivaient aux sons à cette autre époque!  Paradoxal, n’est-ce pas?  Je vous laisse y penser.  Je n’irai pas plus loin sur ce sujet.  Moi, j’en ai tiré mes propres conclusions…

Je sais que ce n’est pas dans la ligne éditoriale habituelle de ce blog mais je me suis permis de déroger le temps d’un billet.  Pourtant, je me rattrape pour vous dire que plusieurs enseignants utilisent le nouveau programme, se l’approprient et vivent assez bien avec cela. 

Je ne crois pas qu’il faille tout balayer du revers de la main.  Il y a du bon dans le nouveau programme d’éducation.  Les idées sont modernes.  On n’est plus à l’époque de la petite école de rang.  Les enfants ont changé, les lieux ont changé, les coutumes ont changé.   Bon, je trouve qu’il n’y a pas encore assez de place pour les TIC.  Elles sont reléguées à la fin des compétences comme un "en cas" ou un "ah oui! vous pouvez faire écrire les enfants à l’ordinateur aussi". Je considère que les TIC devraient avoir la même position que la lecture ou l’écriture dans notre monde d’aujourd’hui. 

Je me suis donc décidé à vous présenter la pyramide qui me permet d’aborder le programme d’un point de vue facilitant. J’ai placé à la base toutes les compétences premières celles sur qui on bâtit les autres compétences.  Elles sont toutes rattachées les unes aux autres parce qu’elles se complémentent bien.  Exemple: 

  1. Il faut savoir lire pour faire la lecture des problèmes de mathématiques.
  2. Quand on résout un problème, il faut écrire la réponse.
  3. Écrire nous aide à raisonner.
  4. Et ainsi de suite, elles sont sur le même pied d’égalité

Les TIC se retrouvent juste au-dessus parce qu’elles peuvent être exploitées dans toutes ces compétences.  Quand les compétences premières sont maîtrisées, elles peuvent toutes être réutilisées dans les TIC par un courriel, un traitement de texte, un enregistrement (baladodiffusion), une vidéo, une recherche sur Internet, etc.

Pour arriver à exécuter efficacement toutes les compétences précédentes (les TIC comprises), il faut avoir des méthodes de travail efficaces, justement.  Quand on a des méthodes de travail efficaces, on peut aborder l’exploitation de l’information et les façons efficaces de communiquer en général.  Il faut aussi avoir une base dans toutes les compétences énumérées précédemment pour envisager de les vivre en équipe et réussir à coopérer.  On peut ensuite mettre à profit sa pensée créatrice et/ou résoudre des problèmes dans toutes les compétences qui précèdent.  Résoudre des problèmes et inventer dans un travail d’équipe, en lecture, en écriture, en TIC, en calcul, etc.  Puis, toutes ces compétences nous amènent enfin à structurer notre identité. 

Pyramide des compétences

Je vous laisse sur une petite réflexion.  Pensez-vous que les enfants ont changé?  Ils apprennent maintenant chez eux, simplement en naviguant sur Internet.  Quand ils en sentent le besoin ou pour répondre à un besoin.  Ils appartiennent à des réseaux d’échanges et d’entraide où ils sont à la fois mentors et mentorés.  Vous me direz que j’exagère, que ce n’est pas un changement.  Et pourtant, la souche du problème est juste sous notre nez:   le savoir que l’on choisit d’apprendre VS le savoir qui est choisi pour nous apprendre.

Connaissez-vous vos légumes: cèleri, carotte, …

Depuis quelques semaines, nous faisons une petite recette à tous les mardis.  Cela entre très bien dans notre thème sur la santé.

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En joignant l’utile à l’agréable, nous apprenons le nom de différents ustensils et instruments de cuisine comme: une passoire, un "économe", une tasse à mesurer, un bol à mélanger, un plat en Pyrex, une cuiller à soupe, etc.  Et en même temps, les enfants apprennent à s’en servir.

Nous faisons aussi des dégustations, histoire de se familiariser avec les saveurs des différents ingrédients et aliments qui entrent dans la composition de nos recettes.  En goutant à tous ces aliments, les enfants découvrent ce qu’est le sel d’ail, le sel d’ognon, le thym, les doriques à oeil noir, les pois chiches, la cannelle, etc.  Ils apprennent du nouveau vocabulaire et ils développent leur gout.

La semaine passée, nous avons préparé une belle trempette avec des carottes fraiches, du cèleri, des tomates et des poivrons rouge, jaune et orange.   Ils étaient tous enchantés de mettre la main à la pâte.  Ils aiment tellement cette activité de recette que j’ai décidé de prendre des photos en vue de préparer quelques activités d’apprentissage dont une à l’oral et une autre à l’écrit.

Et voici une première activité:  faire raconter en ordre chronologique la création de notre trempette.  Au début, je voulais leur préparer une feuille dans "Word" sur laquelle ils iraient coller certaines photos pour expliquer le déroulement de la recette.  Mais, tout à fait par hasard, je suis tombé sur le logiciel "Comic Life" disponible sur l’iMac.  J’ai trouvé que ce serait beaucoup plus intéressant de raconter notre recette comme si c’était une bande dessinée. 

Par contre, mes élèves ne connaissent pas le logiciel en question.  Je me suis penché sur ce problème et je me suis dit que nous ferions d’abord une petite bande dessinée en équipe afin de nous familiariser avec les fonctions de base du logiciel.  C’est ce que nous ferons cette semaine si j’arrive à trouver une période inutilisée au labo car ma véritable période n’est que la semaine prochaine. 

Un élève coupe les poivrons. 

Pour ceux qui se questionnent sur les mots en italique, lisez ce qui suit.  Je n’ai pas fait d’erreur.  Je me suis amusé à utiliser la nouvelle orthographe suggérée par l’Académie française. Maintenant, reste à savoir ce que je dois enseigner:  les mots avec leur ancienne orthographe ou avec la nouvelle.  Qu’en pensez-vous?  Pour en savoir plus, consultez le dictionnaire de l’Académie française sous la rubrique "orthographes recommandées". 

PIA: l’entrevue avec l’élève

Le but de cette entrevue est de rappeler à l’enfant qu’il peut avoir des difficultés dans certains domaines à l’école mais quand même être capable de réussir dans d’autres domaines de la vie avec facilité.  Ce n’est pas tout noir ou tout blanc.  Il doit s’apercevoir de ce fait et vraiment en prendre conscience:  il peut être aussi bon sinon meilleur que les autres enfants dans une autre sphère d’activités.  Il faut se débarrasser des oeillères académiques pour découvrir les dons, les talents, les capacités et les possibilités que tous les enfants possèdent et ainsi arriver à les mettre à profit.

La semaine passée, j’ai rencontré mes élèves pour la rédaction de leur PIA.  J’aime beaucoup faire ces rencontres qui me permettent de discuter avec l’enfant (le principal intéressé) de ses talents, de ses difficultés et de ses buts, ce qu’il voudrait être capable de faire.  Je trouve qu’il est très intéressant de voir comment l’enfant se perçoit. C’est beaucoup plus complet et enrichissant que le regard limité au domaine scolaire que je peux poser.  L’entrevue se déroule comme suit:

  1. Je commence par demander à l’enfant ce qu’il est capable de faire.  Dans quel domaine, il sait qu’il est très bon, ce qui est facile à faire pour lui.  Et j’élargis toujours les horizons en lui parlant de la maison (Que peut-il faire chez lui?), de l’éducation physique (Dans quels sports, il se sent bon?), des arts plastiques, des jeux après l’école, etc.  Il y a toujours un domaine à quelque part où l’enfant peut performer.  Alors, nous discutons des ses talents.  La première fois que l’élève vit cette entrevue, il ne sait pas trop quoi dire.  Il n’est pas habitué de parler de ses talents ou de ses capacités.  Manque de confiance en soi?  Possiblement.  La deuxième fois, il comprend mieux ce que l’on cherche et il se sent plus à l’aise de parler de ses forces.  Peut-être parce qu’il en a pris conscience à la première rencontre.

  2. Nous continuons l’entrevue en parlant de ses difficultés.  Qu’est-ce qui est difficile à faire pour lui?  Est-ce qu’il y a des tâches plus compliquées à faire à l’école, à la maison?  Dans quel domaine, il a besoin d’aide?  À quelles occasions demande-t-il de l’aide à quelqu’un?  Nous prenons des exemples dans la classe ou dans la cour d’école.  Nous discutons de situations que ce sont produites réellement à l’école ou à la maison. 

  3. Pour terminer, nous parlons ensemble de ce qu’il voudrait être capable de faire.  Quels sont ses buts?  Pourquoi vient-il à l’école?  Qu’a-t-il le goût d’apprendre?  Qu’est-ce qu’il s’imagine être en mesure de faire à la fin de l’année scolaire?  Qu’est-ce qu’il aimerait réussir?  Autant de questions pour nous aider à bien cerner les visées que l’enfant peut se choisir.  Il se retrouve maintenant au centre de ses apprentissages.  C’est vraiment lui qui peut savoir ce qu’il veut apprendre. 

Il y a beaucoup d’avantages à procéder ainsi: 

  1. On se retrouve devant un portrait plus complet de l’élève.  Justement, un plan d’intervention qui a été rempli avec l’enfant fait souvent sourire le parent parce qu’il reconnaît bien là son fils ou sa fille.
  2. L’enfant prend conscience de ses forces et de ses faiblesses.
  3. On s’aperçoit qu’il y a plus chez un enfant que les deux dimensions du domaine scolaire.
  4. Il y a un transfert de pouvoir:  je lui dis qu’"il" a le pouvoir de faire quelque chose et que j’y crois.  Sinon, pourquoi parler de lui?  Je suis là pour l’aider mais il doit lui aussi y croire.
  5. On peut partir de ses réussites pour gagner de la confiance en soi.  – Si tu arrives à faire cela, tu peux aussi t’améliorer dans "ce" domaine.

Autant que faire se peut, il faudrait éviter de remplir le plan tout seul sans avoir consulté le principal intéressé.   Combien de plans j’ai fait signer au début de ma carrière à des enfants qui ne se sentaient pas impliqués!  Les règles ont changé:  est révolu le temps de l’école qui impose un savoir défini à des "apprenants", c’est l’élève maintenant qui choisit ses apprentissages en fonction de ses forces, ses intérêts et ses faiblesses.  La crise est là: l’institution avec son savoir réglementé, contrôlé et standardisé VS le savoir disponible en ligne vivant, répondant au style de l’apprenant, captivant parce que choisi par ce dernier.

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